Un vent violent souffla soudain dans mon studio, faisant
voler mes notes et mes affaires au quatre coins de la pièce. De toute mon existence
je n'avais jamais vu un tel phénomène, ce souffle sortait de tous les orifices
et interstices présents dans mon humble demeure provisoire, faisant claquer les
portes et craquer les volets de mes placards, menaçant de les faire céder au moindre
instant. Les objets soufflés par ce vent sorti de nulle part pouvant se montrer
dangereux, je décidais de me réfugier derrière une barricade de fortune formée
par mon lit retourné et incliné, en appui sur le mur du fond, suite a une bourrasque
particulièrement violente. Si cet abri de fortune me protégeait du ballet désordonné
des débris et autres objets en mouvements dans la pièce, il ne me m'épargnait
nullement la cruelle morsure du froid.
En effet, à la puissance phénoménale
du vent s'ajoutait sa température extrêmement basse, digne des contrées arctiques
les plus reculées. La rudesse du mois de décembre (ville) ne pouvait, à elle seule,
expliquer ce phénomène étrange… des stalactites se formaient déjà ça et là aux
4 coins de la pièce, figeant tout mouvement dans son enveloppe de glace, venant
se briser avec fracas contre les murs glacés de ma chambre. Si je me fiais à ma
montre il ne s'était écoulé qu'une quinzaine de minutes depuis le début du phénomène
et pourtant tout était déjà recouvert d'une fine pellicule d'eau gelée.
Le froid se fait de plus en plus insistant, rendant ma respiration douloureuse.
Mes doigts engourdis ont de plus en plus de mal à maintenir mon dictaphone et
à le protéger de la rudesse du climat. Tout est bientôt fini de toute façon,
IL est là. Je sais qu'il est venu pour moi, accompagné des êtres maudits qui
lui sont dévoués, il vient me chercher pour m'amener avec lui dans son repaire
Khaluyréen, si ce dernier existe bien… là bas je finirais en son pouvoir, dépouillé
de toute volonté propre, offrant mes services à sa cause et adorant son être lors
de cérémonies décadentes et contre nature, où se côtoient tous ses adorateurs,
venus de la surface comme des profondeurs. Et là, contre mon gré, je donnerais
sûrement une nouvelle lignée de bâtards dégénérés au service du maître ; espérons
que je tombe sur une partenaire au physique avenant et non entre les membres bourrelets
de sa fidèle servante, ignoble magma de chair flasque aux couinements stridents....
Nul besoin de les voir pour sentir leur présence, ils sont là avec lui, ils
approchent. Les histoires qui circulent sur son compte veulent que le maître vienne
toujours seul, mais je sais désormais que ces dires ne sont pas fondés et que
ses dévoués serviteurs font aussi le déplacement lorsqu'il s'agit de mettre la
main sur les malheureux qui ont poussé trop loin leurs investigations le concernant.
Les couloirs renvoient le résonnement de bruits de succion et de clapotis,
typiques du déplacement d'une masse coulante aux dimensions gargantuesques suintant
un liquide spongieux et collant aux relants putrides. HÄanhyie...